Dans le cadre du projet HENO, une enquête nationale inédite a été menée auprès de 878 Organisations de la Société Civile (OSC) réparties dans les 23 régions de Madagascar. Coordonnée par MSIS-TATAO, en collaboration avec Transparency International – Initiative Madagascar (TI-MG), cette étude vise à recueillir les perceptions, les priorités et les besoins des acteurs de terrain en matière de droits humains. Les résultats de cette enquête ont été présentés lors d’un atelier de restitution qui a rassemblé des représentants d’OSC, des partenaires techniques et financiers, ainsi que des institutions publiques le 17 avril 2025 au Colbert Antaninarenina. L’étude repose sur une méthodologie mixte alliant des outils quantitatifs (questionnaires en ligne, entretiens en présentiel) et qualitatifs (focus groups, questions ouvertes), mobilisant au total 3 799 répondants: dirigeants, membres et personnels d’OSC. L’enquête est fondée sur une approche basée sur les droits humains, intégrant les principes d’universalité, d’indivisibilité, de non-discrimination, d’inclusion, de participation, de dignité humaine et de redevabilité.
Les résultats mettent en lumière cinq problématiques majeures en matière de droits humains, telles que perçues par les OSC. En tête figure la restriction de la liberté d’expression (43,3 %), identifiée comme un frein à l’engagement citoyen et à la mission de veille des OSC. Elle est suivie par les violences domestiques et l’exploitation sexuelle (42,2 %), que de nombreuses organisations estiment banalisées et insuffisamment prises en charge. La précarité des conditions de vie (40,7 %), considérée comme à la fois cause et conséquence des violations de droits, constitue également un obstacle majeur, tout comme les abus de pouvoir (39,1 %) et le manque d’accès à la justice (36,8 %), freiné notamment par les coûts, la distance géographique et le manque d’informations juridiques. Selon les OSC interrogées, la corruption constitue la principale cause des violations des droits humains (68,2 %), suivie par la mauvaise gestion de l’État (39,5 %), l’impunité (39,0 %) et les défaillances des politiques publiques (36,6 %). Ces constats révèlent un besoin urgent de renforcer la transparence, la redevabilité et la participation citoyenne. L’enquête souligne par ailleurs les principaux défis rencontrés par les OSC dans leurs actions : le plaidoyer pour les droits humains, la protection des défenseurs, la recherche de financement durable, l’accès à la justice pour les victimes, ainsi que la sensibilisation et l’éducation aux droits humains. Malgré leur engagement sur le terrain, seules 17,8 % des organisations déclarent collaborer régulièrement avec les autorités centrales. De plus, à peine 21,5 % des membres interrogés affirment se sentir en sécurité dans leurs activités de défense des droits humains.

Face à ces défis, l’étude met en lumière une réponse collective portée par les OSC : la création du réseau MIARO. Ce réseau vise à renforcer la protection des défenseurs des droits humains à Madagascar, en promouvant un espace de veille, de plaidoyer, de partage d’informations et de coordination d’actions à l’échelle locale, régionale et nationale. MIARO ambitionne de devenir une plateforme structurante, capable de mobiliser un fonds commun auquel les partenaires engagés pour la défense des droits humains pourront contribuer. Un site web dédié, www.reseaumiaro.org, a été mis en ligne pour centraliser les informations sur les droits humains, faciliter le réseautage des OSC, proposer des outils pratiques (guides, textes juridiques, documentation), et permettre un signalement sécurisé des cas de représailles ou de violations.
Le projet HENO – qui signifie « écouter » en malgache – entend renforcer la capacité des OSC à agir de manière indépendante, tout en favorisant une meilleure collaboration avec les institutions publiques. Il aspire à restaurer la confiance entre les citoyens et l’État, à promouvoir la transparence, et à encourager la mobilisation collective autour des enjeux liés aux droits humains à Madagascar.
Les constats, analyses et recommandations issus de cette enquête sont portés par MSIS- TATAO, et visent à alimenter un dialogue constructif entre les acteurs de la société civile, les institutions et les partenaires internationaux pour une amélioration durable de la situation des droits humains dans le pays.